
L’obscurité est totale. J’ai le coeur qui me martèle la poitrine.
…81, 82, 83…
Le plus silencieusement possible, je gravis les marches de l’édifice abandonné. Que Phil s’avise de me lâcher la main et je fais pipi dans mes culottes, y’a pas de doute.
…102, 103, 104…
Après 2 semaines à Bangkok, nous avions eu amplement l’occasion d’admirer le Buddha dans toutes ses déclinaisons.
Buddha couché, Buddha doré,
Buddha d’émeraude, Grand Buddha…
Nous en avions assez vu, des temples, admiré, des Buddha, observé, des passants marcher sur Khao San Road. Il fallait bouger maintenant, vite avant de se transformer en pad thai.
…250, 251, 252…
J’ai la chienne. Je ne vois pas où je pose les pieds. Je me fais des scénarios : et si on arrivait sur un étage infesté de rats? Et si on croisait un violent itinérant sur le crack? God bless, j’ai ma lampe frontale. Je l’allume. Sur le mur devant moi, apparaît le graffiti suivant :

Wow. Tout pour me rassurer.
…305, 306, 307…
On compte les marches. Il y a supposément 49 étages à cet édifice abandonné. Il aurait dû s’agir d’un hôtel de luxe, mais la construction de cet immeuble massif a été écourtée en raison d’une crise économique. Depuis 1997, la Ghost Tower se tient debout au milieu de la ville, comme un défaut flagrant dans un beau visage, erreur impossible à corriger.
…502, 503, 504…
On entend des voix. Vite, on court se cacher dans ce qui aurait dû être un placard de salle de bains. Phil me fait signe d’arrêter de chuchoter. On se croirait dans un mauvais suspense. C’est Boris, le fils de Bruno (Blanchet), qui nous a recommandé cet endroit, un beau jour où on est débarqués au Snack-Bar BKK, en manque d’inspiration. À part des temples et des marchés, y avait-il quelque chose à faire dans cette ville? « Pas vraiment », avait d’abord répondu Boris. Puis, après une courte réflexion, il était arrivé avec cette idée. Il nous avait donné quelques précisions : « Le lieu est gardé par des robineux avec qui vous pourrez négocier votre passage. » Il nous avait également déconseillé d’y aller de soir. Je comprends maintenant pourquoi.

Or, nous n’avons croisé aucun robineux à l’entrée, après nous être faufilés sous la clôture, les pieds devant, selon les conseils mimés prodigués à travers une petite fenêtre par un Thaï apparu au moment où l’on se demandait justement par où passer. D’où ma peur maintenant, et si les robineux étaient à notre poursuite? À l’intérieur, des débris jonchent le sol et les murs sont remplis de graffitis. En revanche, la vue des balcons est magnifique. La lumière de fin d’après-midi vient se poser délicatement sur la pierre blanche.

Plus on monte et plus la tension descend. La construction de l’édifice ayant été achevée à 80%, c’est surtout le sommet qui est incomplet. Les étages supérieurs offrent une vue imprenable sur Bangkok et la Chao Praya. Je m’amuse à immortaliser cet endroit unique sous tous les angles. La peur a laissé place à la fascination. Comment a-t-on pu abandonner ainsi un projet dans lequel des millions de dollars avaient déjà été investis?

…883, 884, 885!!!
Enfin arrivés au sommet! Le soleil qui se couche nous rappelle que ce moment est éphémère. Nous le savourons, d’autant plus qu’il s’agit de l’avant-dernière journée de notre périple de 2 mois en Asie.

Bref, même si j’ai passé les trois quarts de l’ascension à me demander pour quelle raison j’avais décidé de prendre part à ce projet débile, je dois avouer que la vue valait la peine.
Belle aventure ! Ça donne le goût ! Moi pas d’aventures très épeurantes en voyage, sauf quand j’ai embarqué avec un étranger pour me rendre dans un petit village au Nouveau-Brunswick… Le Monsieur conduisait tellement mal, j’etais persuadé que je finissais mes jours le crâne craqué dans un fossé
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Ah oui, disons que c’est épeurant aussi, même si ce n’était pas voulu!
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l’avant dernière photo est juste Waouhhhh !!! Enorme !! 🙂
ici pas de grosse frayeur.. j’ai bien eu peur de me faire dévorer par des Banana Slug dans le Washington mais j’ai réussi à négocier ma sortie 🙂
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Hahaha!
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Super belle « escalade » et aventure de voyage. Si je passe par là, pas sûr que je pourrai m’empêcher d’y aller, même si je suis trop vieux pour chercher le trouble. Il me trouve tout seul de toutes façons (pris 2 fois dans des coups d’état 🙂 ).
Je découvre ton blogue. Super photos en passant. Je n’ai passé au Yukon qu’une seule fois en coup de vent pour le travail. Ça a l’air super beau et moins froid qu’on pense.
Qu’est-ce qui t’as amenée là ?
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Merci! Je suis venue pour le travail. J’ai d’abord eu un contrat de 9 mois, puis je ne suis jamais repartie. C’est une région magnifique, froide, oui, mais pas que. En été il fait super beau!
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Y cherche t’on des infirmières? J’ai surtout de l’expérience en santé communautaire. Comment les yukonnais reçoivent-ils les étrangers? Ont-ils des problèmes de santé comparables à nos peuples nordiques québécois?
J’ai envie d’exotisme et de m’impliquer avec des gens qui ont grand besoin d’aide mais supporte mal la chaleur…..et je carbure à la vie au grand air et aux paysages comme ceux que tu nous exhibes…
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Je ne suis pas spécialiste en santé communautaire, mais je sais que les infirmières ont de bonnes conditions de travail au Yukon et je crois qu’elles sont très en demande dans les communautés rurales. Vous pouvez peut-être vous informer auprès de l’Association franco-yukonnaise.
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oh! j’ai eu des frissons au début, surtout la photo où s’est écrit « You’ll find only sufferers here ». Quelle aventure
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